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PARIS – C’est un projet de loi français qui a suscité une énorme controverse avant même sa publication – et ne mentionne même pas le problème que le président Emmanuel Macron dit qu’il est censé aborder: «le séparatisme islamiste».
La crainte que les extrémistes islamistes créent des communautés et leur inculquent des idées qui les séparent des valeurs de la République française est réapparue comme un enjeu majeur de la politique française ces derniers mois.
Trois attaques meurtrières perpétrées par des radicaux islamistes ont eu lieu en France pendant quatre semaines cet automne, déclenchant un nouveau débat public tendu sur le volet français de la laïcité, connu sous le nom de laïcité, la place de l’islam et des libertés individuelles. Certains critiques, en particulier à l’étranger, ont qualifié la politique de Macron d ‘«illibérale» – déclenchant une réaction féroce du président et de ses alliés.
Désormais, le projet de loi, initialement décrit comme concernant le «séparatisme», puis «les séparatismes» et désormais intitulé la loi «renforçant le respect des principes de la République», a enfin été présenté.
Dans un geste symbolique, le gouvernement a envoyé le projet de loi au Parlement à l’occasion du 115e anniversaire de la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État, pierre angulaire de la République française.
Voici cinq choses à savoir sur le projet de loi, dont l’Assemblée nationale débattra en janvier, avec la possibilité d’introduire des amendements.
1. Raconter les omissions
Nulle part dans le texte du projet de loi les mots «islamisme» ou «séparatisme» n’apparaissent – dans une tentative apparente d’éviter les critiques selon lesquelles le projet de loi cible les musulmans.
Et pourtant, lorsqu’on lui a demandé de donner des exemples de problèmes qui doivent être réduits, le Premier ministre Jean Castex n’a cité que des comportements liés à l’islamisme dans une interview accordée au Monde qui a présenté le projet de loi mercredi, faisant référence à des enfants «refusant de jouer avec des non-musulmans». ou “récitant [Koranic] surats tout en fermant les oreilles en cours de musique.
En outre, dans son discours historique sur la question le 2 octobre, Macron a déclaré qu’il était important de nommer les choses clairement et a parlé explicitement de «séparatisme islamiste».
Et dans le document décrivant les motivations du gouvernement pour présenter le projet de loi, «l’islamisme radical» est la seule forme de «séparatisme» explicitement mentionnée.
«Une infiltration communautaire insidieuse mais puissante gangrène lentement les fondations de notre société dans certaines régions. Cette infiltration est pour la plupart d’inspiration islamiste », indique le document.
2. Mesures clés
Le projet de loi vise à renforcer les outils juridiques dont dispose le gouvernement pour empêcher le radicalisme islamiste de s’implanter dans la société française.
Cela crée une nouvelle infraction pénale consistant à menacer des employés du secteur public ou à utiliser la violence pour les forcer à faire des exceptions aux règles publiques, comme le fait de contraindre les autorités locales à établir des heures de piscine séparées pour les femmes et les hommes.
Cela crée une autre nouvelle infraction pour le discours de haine qui permet de détenir rapidement une personne qui diffuse sur les réseaux sociaux les informations personnelles d’un agent du service public avec l’intention de lui faire du mal – en réaction directe aux événements qui ont conduit à la décapitation de l’instituteur Samuel Paty en octobre.
Le projet de loi étend également ce que l’on appelle en France le principe de neutralité, qui interdit aux fonctionnaires de porter des symboles religieux ostentatoires comme le foulard musulman et d’exprimer des opinions politiques, au-delà des employés du secteur public, à tous les entrepreneurs privés des services publics.
Il introduit des contrôles financiers plus stricts sur l’argent étranger envoyé aux organisations religieuses et des contrôles plus stricts sur les associations religieuses pour empêcher les prises de contrôle par des extrémistes.
Le projet de loi limite la possibilité de scolariser les enfants à la maison, introduit des sanctions plus sévères pour les «tests de virginité», et des garanties plus strictes contre les mariages forcés, ainsi que des outils plus juridiques pour garantir que les hommes et les femmes héritent équitablement. La charia musulmane accorde aux hommes des héritages plus importants qu’aux femmes.
3. Changements notables
Le gouvernement avait initialement prévu d’inclure une clause soulignant la nécessité pour chaque enfant d’âge scolaire d’avoir un numéro d’identification national pour s’assurer que tous sont comptabilisés, qu’il fréquente les écoles publiques, privées ou soit scolarisé à la maison. Cette clause a disparu du texte.
La grande majorité des élèves ont déjà un identifiant national d’élève, mais environ 2% des élèves d’âge scolaire n’en ont actuellement pas, selon un responsable du ministère de l’Éducation. Le gouvernement envisage toujours d’introduire un amendement avec un mécanisme technique pour étendre la couverture à tous les élèves.
Lorsque Macron a présenté sa vision de la lutte contre le «séparatisme islamiste» dans un discours historique dans une banlieue parisienne le 2 octobre, il a trouvé un équilibre entre les mesures juridiques pour réprimer les extrémistes et les mesures sociales pour s’attaquer à des problèmes tels que la marginalisation de certains musulmans. et d’autres dans la société française.
Mais ce projet de loi particulier est fortement axé sur les mesures visant à aider à faire appliquer la loi et à punir les comportements extrémistes. Les mesures socio-économiques sont largement absentes, bien que les responsables disent qu’elles suivront.
4. Controverses possibles
Les responsables français insistent sur le fait que le projet de loi ne vise pas les musulmans – mais il pourrait toujours être perçu de cette façon.
“Il ne devrait y avoir aucun malentendu”, a déclaré un responsable de l’Elysée. «Ce n’est en aucun cas une action contre une religion. Ce n’est pas contre l’islam, c’est contre les gens qui, au nom d’une vision erronée ou reconstruite d’une religion, se comportent d’une manière contraire à la république.
Mais les députés de La République en Marche, le parti de Macron, disent qu’ils envisagent d’introduire un amendement au projet avec des mesures visant à interdire aux parents de faire porter le foulard à leurs jeunes filles.
Le projet de loi risque également de toucher des personnes et des organisations qui ne sont pas sa cible.
Le fait d’obliger les parents à demander l’autorisation d’école à la maison au lieu du système actuel qui les oblige simplement à divulguer qu’ils le font peut provoquer une réaction brutale chez les parents qui font l’école à la maison.
Selon les autorités françaises, sur les 62 000 élèves actuellement scolarisés à domicile dans tout le pays, environ 5 000 peuvent être éduqués dans des structures ad hoc qui ne respectent pas le programme ou les exigences françaises.
Et une nouvelle obligation de déclaration pour les dons étrangers de plus de 10 000 €, principalement destinée à réduire les liquidités des islamistes à l’étranger, pourrait frapper d’autres petites associations religieuses, comme les associations évangéliques qui reçoivent des financements des États-Unis ou d’ailleurs.
5. Numéros manquants
Les tests de virginité, les mariages forcés et l’enseignement à domicile de jeunes enfants dans des sous-sols où des filles aussi jeunes que 3 ans sont obligées de porter le foulard sont quelques-uns des principaux exemples que Macron et les principaux ministres du gouvernement ont brandis comme des cas de comportements islamistes contraires aux valeurs républicaines qui être combattu.
Mais les responsables gouvernementaux n’ont pas été en mesure de fournir des données prouvant qu’il s’agit de problèmes à une échelle significative. Ils ne disposent pas de chiffres sur le nombre de tests de virginité effectués en France, ni de statistiques sur les mariages forcés. Cependant, ils disent que les ONG évaluent le nombre de mariages forcés en France à 200 000. Ils ont également eu du mal à quantifier à quel point le problème de forcer les jeunes filles à porter le foulard est vraiment répandu.