Il peut sembler que les négociations pour un accord commercial entre l’UE et le Royaume-Uni durent depuis toujours. Mais en fait, ils ont été menés à une vitesse record. Le premier tour n’a eu lieu qu’en mars.
Les accords commerciaux, qui sont notoirement difficiles et détaillés, prennent souvent le courage d’une décennie pour être conclus. Mais la Grande-Bretagne voulait être totalement détachée de l’UE dans les plus brefs délais et a renoncé à une chance de gagner plus de temps en juillet, même après que la pandémie ait interrompu les négociations.
L’accord précédent de 2019 ne couvrait que les conditions de la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE, y compris le règlement financier et la manière d’éviter une frontière sur l’île d’Irlande. Depuis que le Royaume-Uni a quitté le bloc en janvier, il est dans une période de transition, poursuivant globalement le statu quo jusqu’à ce que les nouvelles conditions prennent le relais le 1er janvier. Le nouvel accord couvrirait tout, du commerce énergétique transfrontalier aux accords de sécurité aérienne, en passant par la coopération entre les forces de police.
Les 27 autres États membres de l’UE ont convenu d’un mandat de négociation en février et ont chargé Michel Barnier de l’exécuter. Chaque État membre a plaidé pour des aspects qui défendraient autant que possible leurs intérêts nationaux, ainsi que pour les lignes rouges communes de protection du marché unique et de l’ordre juridique de l’Union.
Les lignes rouges de la Grande-Bretagne découlent de la justification du Brexit et concernent le pouvoir souverain. Il veut avoir la capacité de fixer ses propres règles et de déterminer qui peut pêcher dans ses eaux, et rejette les tribunaux européens en tant qu’autorité ultime qui peut trancher tout différend potentiel.
Les pierres d’achoppement
Les deux parties veulent un commerce libre de droits avec l’autre, et 95 pour cent du texte serait presque finalisé. Mais trois obstacles ont empêché la conclusion d’un accord toute l’année et restent les dernières pierres d’achoppement: les règles du jeu équitables, la gouvernance et la pêche. Chacun découle de différences idéologiques fondamentales entre les deux parties.
Les bateaux de l’UE capturent environ 650 millions d’euros de poissons dans les eaux définies ces dernières décennies comme la zone économique exclusive de la Grande-Bretagne. De nombreux bateaux continentaux y pêchent depuis des décennies ou des siècles, ce qui entraîne deux demandes irréconciliables et hautement politiquement sensibles. La Grande-Bretagne veut reprendre toute la course et distribuer l’accès lors de négociations annuelles, tandis que l’UE souhaite globalement que le statu quo se poursuive. Chacun n’a fait de compromis qu’en offrant de céder 20 pour cent à l’autre.
Les règles du jeu équitables sont peut-être l’obstacle le plus important. L’UE insiste sur le fait que les entreprises britanniques ne peuvent pas vendre sans obstacle sur le marché unique à moins qu’elles ne suivent globalement les mêmes normes que les entreprises de l’UE. Sinon, la Grande-Bretagne pourrait réduire les réglementations et donner à ses entreprises un avantage économique permanent par rapport à leurs homologues de l’UE qui sont tenus de respecter des normes plus strictes.
L’UE cherche un moyen de convenir de normes comparables qui ne divergeront pas trop au fil du temps, et un moyen de les faire respecter pour garantir que la Grande-Bretagne respecte ses engagements.
C’est un anathème pour la Grande-Bretagne, car avoir la liberté de fixer ses règles sans aucune autorité de l’UE était le but du Brexit.
Cela recoupe la question finale de la gouvernance, à savoir quelle autorité pourrait arbitrer les différends et faire appliquer l’accord.
L’introduction par le gouvernement de Londres de lois qui enfreindraient certains aspects de l’accord de retrait de l’année dernière a durci la détermination de l’UE selon laquelle ces garanties doivent être vêtues de fer.